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La confiance
La première notion à travailler avec un groupe en impro est la confiance. C'est pour le meneur d'atelier d'une condition sine qua non pour s'engager avec qualité dans la mutation du comédien à l'improvisateur. On travaille alors beaucoup sur le groupe avec cette notion mais, de fait, le groupe existe déjà, il se réunit régulièrement autour d'un même projet; le temps aura un effet bien plus favorable sur le groupe que la confiance. Elle risque de créer un cocon, renforçant alors cette "carapace de satisfaction" si rassurante entre copains. Or en impro, nous devons être nus : se façonner un bouclier n'est pas la bonne option.
Les exercices épurés sont mes favoris. Marcher en occupant l'espace pourrait occuper une séance de 3 heures. Par exemple : Les yeux fermés, marcher dans l'espace. Il est difficile de reproduire totalement les conditions extrêmes que nous impose un spectacle d'impro, pour cela les lieux d'entraînement doivent devenir nos dojos, les obstacles y seront plus forts qu'en spectacle. Se priver de ce sens indispensable et prédominant nous permet de redécouvrir sensiblement le monde. Marcher les yeux fermés pour certains pratiquants est effroyable. Il y a la peur de se faire mal, la peur d'être regardé, la peur d'être déboussolé.
Comment pourrait il en être autrement ? On fait de la peur l'un des moteur de notre monde moderne. Développer la confiance chez l'improvisateur passe surtout par l'observation et l'acceptation de ce qui le constitue plutôt qu'un combat vers un idéal. Si la peur surgit, il faut l'accueillir. Tout peut devenir jeu sur scène.L' impro est régulièrement auto-centrée sur les comédiens. Ils en sont la matière première. La diversité des individus composant une équipe et les cadres imposés devraient en faire une recette différente à chaque spectacle. Pourtant nous assistons de plus en plus à des impros formatées : le résultat d'un manque de confiance. Jamais l'impro ne sortira du divertissement si nous la cantonnons à ce que le public attend de nous. Les spectacles d'improvisations théâtrales sont, pour la plupart efficaces, l'œil aiguisé devinera exactement ce qui va se jouer par la suite. Le spectateur est rassuré, il a oublié un temps ses soucis mais quand sera-t-il touché ? Quand sera t-il interloqué ? Toutes ces sensations que peuvent procurer des arts matures comme le cinéma ou la danse, nous donnons leur le temps et les moyens d'apparaître ?
Il y a un manque de sincérité sous-jacent. De façon plus sensible nous pouvons toucher le spectateur. Lui aussi a sans doute peur en assistant à de l'impro, pourtant il fait confiance à l'acteur : faisons lui confiance en retour...
J.G